Morts de migrants en hausse en 2024 : record de naufrages dans la Manche

Naufrages dans la Manche : comment expliquer le nombre record de migrants morts en 2024 ?
          Douze personnes ont péri au large des côtes françaises, mardi, en tentant de rejoindre l'Angleterre. Ce drame porte à 34 le nombre de décès recensés depuis janvier, un total inédit depuis le début de ces traversées par la mer.

Mardi, douze individus ont perdu la vie en essayant de traverser la Manche pour rejoindre l’Angleterre. Ce tragique incident vient s’ajouter à une série de décès qui s’élève désormais à 34 depuis le début de l’année, un chiffre jamais atteint auparavant dans le contexte de ces traversées maritimes.

Douze personnes ont perdu la vie en mer le mardi 3 septembre, lorsque l’embarcation sur laquelle elles tentaient de rejoindre l’Angleterre s’est brisée au large de Boulogne-sur-Mer, dans le Pas-de-Calais. Depuis janvier, 34 candidats à l’exil ont tragiquement perdu la vie dans la Manche, selon un bilan communiqué à franceinfo par la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord (Premar). L’année 2024 devient ainsi la plus meurtrière depuis le début des traversées à bord de bateaux de fortune, recensées à partir de 2018. Le précédent record datait de 2021, avec 31 morts, dont 27 lors d’un naufrage en novembre. En 2023, 16 personnes ont péri en mer, et 5 en 2022, selon la préfecture maritime. Il y a eu « plus de drames » ces derniers mois, admet la Premar, tout en soulignant qu’un seul naufrage peut avoir des conséquences catastrophiques, sans pour autant refléter l’activité de l’année.

Une voie maritime plus « efficace », mais plus « dangereuse »

La recrudescence de la mortalité s’explique en partie par le fait que le vecteur principal d’immigration vers l’Angleterre est désormais la voie maritime. Les contrôles renforcés dans le port de Calais et le tunnel sous la Manche ont rendu plus difficile l’accès à l’Angleterre par voie terrestre et ferroviaire, poussant ainsi les candidats à l’exil à emprunter la voie maritime. Cette dernière est considérée comme plus « efficace », car environ 40% des embarcations parviennent à quitter le rivage français sans être interceptées. Cependant, elle est également plus « dangereuse » car les migrants sont souvent prêts à embarquer sur des bateaux en mauvais état, sans gilet de sauvetage ni savoir nager, ce qui augmente les risques de drame en cas d’incident en mer.

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Des départs « de plus en plus loin » et plus « violents »

La politique répressive des autorités a également un impact sur la dangerosité des traversées. Le déploiement massif de forces de l’ordre le long du littoral français pousse les passeurs à organiser des départs de plus en plus loin, jusqu’à Dieppe ou la baie de Somme, augmentant ainsi les risques liés à la durée de la traversée et aux conditions météorologiques. De plus, les passeurs ont recours à des « taxis boat », embarcations lancées sur des rivières avant de rejoindre la mer, obligeant les migrants à nager pour les rejoindre, ce qui accroît les risques d’hypothermie et de noyade. Ces conditions stressantes et dangereuses ont conduit à des situations de panique lors des embarquements, provoquant des ruées dans les bateaux et des décès tragiques.

Des bateaux « surchargés » et « moins sûrs »

Les efforts pour lutter contre les réseaux de passeurs ont conduit à une réduction du nombre de bateaux acheminés jusqu’au littoral. Cependant, cela n’a pas dissuadé les candidats à l’exil, qui sont désormais nombreux à s’entasser à bord d’embarcations de plus en plus surchargées. Alors que les bateaux accueillaient en moyenne 50 à 60 migrants en 2022 et 2023, on compte aujourd’hui jusqu’à 70 à 80, voire 100 personnes par embarcation pneumatique. Cette surcharge augmente considérablement le risque de naufrage. De plus, les passeurs prennent désormais davantage de risques en partant dans des conditions météorologiques défavorables, de nuit et sans interruption pendant l’hiver. Les bateaux semblent également moins sûrs qu’auparavant, incitant même certains migrants à appeler les secours en reconnaissant le danger de la situation.

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Cette augmentation de la mortalité était-elle prévisible ? Les experts soulignent que les migrants et les réseaux de passeurs s’adaptent en permanence aux mesures de sécurité mises en place, ce qui peut les amener à prendre davantage de risques. Ils regrettent une approche essentiellement sécuritaire des autorités, mettant en avant la nécessité d’une approche plus globale incluant l’organisation de l’accueil des migrants en France, le développement de politiques de retour volontaire et la mise en place de passages sûrs vers le Royaume-Uni. La politique actuelle est jugée coûteuse tant sur le plan financier qu’humain, puisqu’elle n’empêche pas les traversées et engendre un coût humain important.

Source de l’article : Francetvinfo

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